vendredi 26 novembre 2010

La fable du fabuliste incertain de Roland Dubillard (suite et pas fin)


(...) J’ajouterai d’abord que cet homme, sa honte s’expliquait d’autant moins qu’elle n’était pas seule, sa main gauche, à être en bois, à cet homme. Le bras gauche aussi, il l’avait en bois. Et tout. C’était un homme en bois, un bonhomme en bois. J’aurais dû commencer par là. Je la récite mal, cette fable. En fait, c’est l’histoire d’un bonhomme en bois, comme on en voit beaucoup, en bois ordinaire. Rien de très particulier. Si : sur la tête, on lui avait collé des cheveux très longs. Et j’ajoute : verts. Des cheveux verts. Vous verrez plus tard l’importance de ce détail.
(à suivre...)

jeudi 25 novembre 2010

La fable du fabuliste incertain de Roland Dubillard



Je crois que je vais réciter une fable. Ce sera la fable d'un homme que j'ai connu. D'un homme, comment dire, oui, d'un homme mais distingué. Je veux dire que quelque chose le distinguait des hommes ordinaires. Cette chose c'était sa main gauche. Elle sortait trop de l'ordinaire pour qu'il la sortît volontiers de sa poche, cet homme, sa main. Il en avait honte. Elle était en bois.
Ce n'est pas que le bois en lui même lui parût une chose honteuse, à cet homme. Non, même une main en bois qu'il eût trouvée par hasard, il l'aurait serrée volontiers. Que cette main en bois lui appartînt à lui n'était pas non plus ce qui le rendait honteux.
Non: il y a des hontes qui ne se raisonnent pas. On pourrait croire que ma fable s'arrête là, avec cette morale déjà forte. Pourtant, je continue, vous allez voir.
(à suivre...)